Prison, tumeur : si je suis encore en vie, ce n’est pas pour rien

Je m’appelle Julien, j’ai 28 ans. Je suis un enfant de la DASS, j’ai été placé quand j’avais 6 mois dans un foyer, dont je fuguais régulièrement. A chaque fois je retournais chez ma mère, mais elle ne m’ouvrait pas, car elle aurait pu avoir des problèmes avec la justice. J’ai dormi sur son palier, puis dans des cages d’escaliers ou dans des voitures… J’avais une colère en moi que je n’arrivais pas à comprendre et qui m’a emporté dans la délinquance …

A 13 ans je découvre la prison. Au moins, ma mère venait me voir au parloir. A mes 16 ans j’ai pris 3 ans pour vol de voiture en bande organisée parce que je n’ai pas voulu parler.

Mon frère est parti en prison juste au moment où je suis sorti et ça m’a fait mal au cœur pour ma mère. On m’a proposé son appartement, et j’ai fait des démarches pour le faire sortir… Quand il est rentré, il m’a dit de prendre mes affaires et de partir. Lui qui aurait dû me protéger et me donner un cadre, il m’a remis à la rue. J’ai eu la haine à nouveau…

Je me suis demandé combien de temps j’allais attendre de l’amour de gens qui ne m’en donnaient pas.

On ne s’est pas parlé pendant 5 ans. Un jour j’ai consulté parce que j’avais mal au crâne, je pensais que c’était à cause d’une bagarre. Le médecin me dit « vous n’avez rien sauf votre tumeur ». Elle avait mis 25 ans à se voir sur image. Je pars à Paris et je me fais embaucher au café du Trocadéro. Je finissais mon boulot à 2h du matin et j’essayais de me cacher dans le dernier RER. Au bout de 3 semaines mon équipe s’en rend compte et ils me donnent leurs pourboires en attendant que je puisse toucher mon 1er mois. Ça m’a permis de trouver une coloc à Melun : chaque jour je fais 1h de trajet pour y aller et 4 h pour revenir dans le bus de nuit. J’ai loupé 3 fois mon RDV pour l’opération, la neurologue de Sainte Anne m’a dit que je risquais la rupture d’anévrisme. Mais j’avais besoin d’être rassuré, je suis allé dans un autre hôpital pour prendre des conseils. Là-bas je tombe sur un patient, dont la fille vient s’occuper, il bavait et était quasi paralysé. Elle m’a dit : « Tu vois mon père ? Il était normal il y a deux jours, il était chef d’entreprise. Puis il a fait une rupture d’anévrisme. Tu veux finir comme lui ? ». Là je file dare-dare à l’hôpital pour me faire opérer.

Dans la bible, j’avais lu une phrase qui m’avait bouleversé : « Quoique tes parents t’aient fait, tu n’as pas le droit de les haïr ». J’ai repris contact avec ma mère et je lui ai appris que j’avais une tumeur, je lui ai dit que ce n’était pas de sa faute : ça ne pouvait pas se voir avant. Quand je me suis réveillé, elle était là. On ne s’était pas vus depuis 5 ans. Avec beaucoup d’émotion je lui ai dit : « Maman je veux qu’on reconstruise notre relation, mais je veux qu’on prenne le temps ». En me réveillant de cette opération, je prends conscience que si Dieu m’a laissé sur terre, ce n’est pas pour rien.

A l’époque où j’ai connu Lazare, je dormais sous tente. Eric m’a appelé en me disant « J’ai envie de te tendre la main et de t’aider à réaliser tes rêves ». A Lazare, le fait de vivre ensemble et de ne pas être seul, ça m’apporte beaucoup.

Il y a toujours une oreille qui va t’écouter, et tu es toujours une oreille pour quelqu’un d’autre.

Un témoignage c’est court, mais ma vie continue : aujourd’hui j’ai plein de projets en tête : faire de la musique et retrouver un travail (restauration, ménage, entretien…).

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